Le siècle de Louis XIV est souvent vu comme une période de transition vers ce qu’on a appelé la modernité. Loin de l’uniformité que suggère cette vision linéaire de l’histoire, il est en réalité travaillé par une série de tensions qui se manifestent dans les textes, dans les représentations artistiques et spécifiquement dans la conception du corps humain, perçu tout à la fois comme un tout organique constitué d’éléments hétérogènes, comme un alliage de matière et d’esprit, comme une combinaison de rationalité et d’affects, comme singulier et universel.
Siège des passions et enveloppe mortelle, le corps rappelle la fragilité humaine, en même temps qu’il impose, notamment à travers les portraits, l'autorité royale. Figure du corps social et politique unitaire, il représente volontiers, quand il est blessé, meurtri, les risques de fracture de la communauté, révélant l’envers de l’idéologie monarchique. Vitrine publique, maîtrisée par le courtisan habile, il peut aussi trahir, par ses expressions ou son regard, l’intériorité complexe de l’âme. Frontière entre l’intérieur et l’extérieur, il est le lieu d’articulation de l’identité sociale et de la subjectivité. Mais il est également divers, modelé par les climats et les milieux dont les voyageurs rapportent des images et des récits, et sa particularité invite à interroger la place de l’homme occidental dans le cosmos élargi par les conquêtes, ainsi que les hiérarchies construites entre les êtres vivants.

Enfin, instrument de l’acteur et du danseur, il est l’objet d’une maîtrise artistique qui se règle au cours du XVII^e siècle.

Cette journée s'attachera à interroger les enjeux esthétiques, sociaux, anthropologiques et politiques des représentations du corps dans les arts, en se demandant comment elles révèlent et accompagnent les transformations et découvertes qui ont marqué le XVII^e siècle.