Antoine MONNOYER

Nature morte aux pièces d’orfèvrerie, plats de raisins et de pêches, guirlandes et fleurs

Huile sur toile, vers 1725.
Cadre en bois doré et sculpté anglais.
Hauteur 220 x Longueur. 186,5 cm.

Découverte interactive de l'œuvre

La monumentalité de ce tableau attire l’œil du visiteur lorsqu’il entre dans la salle du musée consacrée à l’art sous Louis XIV : cet effet a été recherché par le peintre, ainsi que par le commanditaire souhaitant impressionner ses hôtes, le faste de l’œuvre renvoyant ainsi à la richesse de la demeure et de son propriétaire. Ce tableau est très représentatif d’une nouvelle forme de nature morte décorative qui voit le jour au milieu du XVIIe siècle. 

Notice détaillée

L’héritage d’un père peintre de fleurs

C’est dans un milieu propice que naît Antoine Monnoyer (1671-1747), dont le père, Jean-Baptiste, vient d’être reçu à l’Académie royale de peinture et de sculpture comme « peintre de fleurs ». Ses dispositions artistiques aidant, le jeune Antoine suit les pas de son père en Angleterre et participe à la décoration de l’hôtel Montagu, à Londres, aux côtés du peintre Charles de La Fosse. 

À la mort de son père, Antoine part à Rome en 1699 pour parachever sa formation avant d’être reçu académicien en 1704 sur un tableau de « fleurs et de fruits » (Paris, musée du Louvre) qui consacre sa spécialisation dans ce genre. L’empreinte de l’artiste y est déjà reconnaissable avec le fond d’architecture, l’accumulation des fleurs et des fruits ou encore le mobilier précieux. S’en suivent différents chantiers prestigieux (chapelle de Versailles, château de Meudon…) où il travaille aux côtés du peintre Jean-Baptiste Blin de Fontenay, collaborateur de son père et époux de sa sœur, qui continue à le former. Mais c’est à l’étranger que le jeune Monnoyer va s’illustrer et diffuser le style familial en retournant tout d’abord en Angleterre jusqu’en 1729, puis en séjournant à Rome avant de voyager vers 1733 au Danemark et en Suède. 

La nature morte aux pièces d’orfèvrerie dont l’historique ne nous est pas connu, aurait pu faire partie du décor des appartements du roi au palais de Stockholm, dont l’une des œuvres présente une composition similaire et un perroquet très proche (Grands morceaux de fleurs et urnes précieuses, Stockholm, Nationalmuseum). Mais cette hypothèse semble contestée par le format ainsi que par la datation qui renvoie davantage à sa deuxième période anglaise. Ce tableau, qui montre un « buffet », était plus certainement destiné à une pièce de belles dimensions, sans doute une salle à manger.

Un déploiement de luxe

Vers le milieu du XVIIe siècle, un faste nouveau provenant de la peinture flamande et hollandaise s’empare du genre de la nature morte. Inférieur par son statut, du fait de l’apparente imitation de la nature, il se voit renouvelé par un format plus imposant et un cadre architecturé conférant au tableau un caractère monumental. La nature allégorique, poétique et parfois moralisatrice disparaît derrière la représentation séduisante de fleurs et de fruits en abondance ainsi que de matériaux précieux. 

Une construction pyramidale organise l’espace où guirlandes de fleurs et fruits prennent place autour de grands plats d’orfèvrerie et d’objets d’art en porphyre, en marbre ou en lapis-lazuli. L’une de ces pièces attire particulièrement le regard par la préciosité de son décor fait de scènes mythologiques et de figures maritimes. Représentée également dans la tenture du Mois de mars de la série des Maisons royales réalisée à la manufacture des Gobelins, cette buire d’argent a été commandée par Louis XIV en 1669 pour le grand buffet d’argenterie destiné au château de Versailles. Ces objets ayant été fondus entre décembre 1689 et février 1690 pour financer les guerres, Antoine Monnoyer témoigne de son intérêt pour ces pièces historiques dont il fait perdurer l’image. L’artiste s’attache ainsi à la représentation des matières, des formes et des couleurs montrant ainsi sa virtuosité. Mais c’est l’effet décoratif qui intéresse Monnoyer et il n’hésite pas à choisir des couleurs quelque peu fantaisistes pour harmoniser sa composition, comme les prunes veinées de rouge et de bleu, créant ainsi un lien chromatique entre les pêches et les raisins.

La manie des fleurs et des fruits

« Si le roy devient si curieux de plantes comme l’on dict, cette curiosité acquerra bientôt de la réputation plus grande que jamais ». Cette curiosité pour les espèces naturelles que décrit l’érudit Fabri de Peiresc au début du XVIIe siècle se développe avec la constitution de cabinets de curiosité mais aussi à travers la création de jardins où s’observent des spécimens rares des merveilles du monde. Un peu plus tard, La Bruyère dépeint également ce phénomène qui s’est élargi à la société toute entière avec les « fleuristes » et les « curieux de fruits » (De la mode, 1688) qui se passionnent pour les tulipes, les anémones ou les œillets tout en s’échangeant entre eux des bulbes et des arbres fruitiers. Les tableaux de « fleurs et de fruits » permettent donc de pérenniser cette collection fugace et fragile tout en créant une synthèse organisée des possessions du commanditaire. Les espèces des différentes parties du monde se mélangent comme le melon venant d’Afrique ou le perroquet exotique au premier plan et les saisons peuvent également être représentées ensemble. Les formes les plus opulentes et les couleurs les plus éclatantes mêlées aux objets d’art précieux font échos aux grands buffets dressés lors des fêtes attestant du goût pour le trompe l’œil et reflétant le rang et la richesse du commanditaire.

Les podcasts du musée du Grand Siècle

Nature morte aux pièces d'orfèvrerie, plats de raisons et de pêches, guirlandes et fleurs par Antoine MONNOYER

Quel faste ! Sur un grand meuble en marbre surmonté d’un présentoir de bois, des coupes et des bassins regorgent de fruits éblouissants, des guirlandes de fleurs défient le temps et les saisons … Le luxe s’affiche avec exubérance pour célébrer avec éclats les plaisirs de la vie !

Bibliographie

  • ARMINJON Catherine (dir.), Quand Versailles était meublé d’argent, cat. d’exposition, Versailles, Etablissement public du musée et du domaine national de Versailles, 2007.  
  • SALVI Claudia, D’après nature. La nature morte en France au XVIIe siècle, Tournai, La Renaissance du Livre, 2000.
  • SALVI Claudia, « Trois peintres de fleurs à Meudon : Jean-Baptiste Monnoyer, Antoine Monnoyer et Blin de Fontenay », Bulletin de la Société de l’histoire de l’art français, Paris, p. 19-41, 1998.

 

Des activités pour les enfants

Pour s'amuser en famille, imprimez le dessin de la nature morte d’Antoine Monnoyer et coloriez-le. N’hésitez-pas à être créatif par rapport au modèle original. Les 3 plus beaux donneront droit à une entrée gratuite (une entrée gratuite pour un adulte accompagnant un enfant lauréat). 

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La Rixe de Georges Lallemant

Première œuvre acquise par le musée du Grand Siècle, ce tableau vient compléter un corpus encore méconnu de cet artiste majeur de la scène parisienne au début du XVIIe siècle. Singulière par son sujet populaire d’inspiration caravagesque, La Rixe permet d’apprécier la diversité des manières de peindre en ce début de siècle.

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