Rosalba CARRIERA (Chioggia, 1675 – Venise, 1757)

Portrait de Giovanni Poleni, vers 1735-1740

Pastel, vers 1735-1740.
H. 54,6 ; L. 42 cm.

Découverte interactive de l'oeuvre

Notice détaillée

Rosalba Carriera, une pastelliste de renommée internationale

L’ambition des pastellistes du début du XVIIIe siècle est de faire rivaliser leur technique avec la peinture à l’huile, en tirant parti de ses ressources tactiles et des effets de matière. En se consacrant au portrait, la vénitienne Rosalba Carriera parviendra à atteindre dans ce domaine une reconnaissance internationale. Le Journal qu’elle tient en 1720-1721 lors de son séjour à Paris témoigne de la célébrité de la pastelliste, hébergée à l’hôtel Crozat : ses appartements ne désemplissent pas de riches clients désirant obtenir d’elle leur effigie. Les effets poudrés, le fondu des tons et la fraîcheur de ses couleurs plaisaient beaucoup aux contemporains, qui n’hésitaient pas à rapprocher la douceur de sa manière des grands maîtres : « les uns vous comparent au Corrège, d’autres vous mettent au-dessus », lui écrivait ainsi galamment Crozat (lettre du 12 mars 1728). L’artiste est très appréciée pour ses mises en scène délicates ; ses pastels montrant des jeunes femmes avec des attributs tels que des colombes anticipent l’art de Greuze.

L’identification du modèle : un scientifique de grand renom, Giovanni Poleni

Le modèle de ce portrait est un physicien renommé, Giovanni Poleni (1683-1761), qui occupait la chaire d’astronomie à l’université de Padoue en 1719, avant de succéder à Bernoulli à celle des mathématiques. En 1735-1740, époque à laquelle on peut stylistiquement situer ce portrait, il avait entre 52 et 57 ans (ce qui est en accord avec l’âge apparent du modèle). Il a été identifié grâce à un dessin, dont la composition est identique, qui se trouvait dans les papiers de Poleni, aujourd’hui conservés à la Bibliothèque Marciana de Venise. La fin des années 1730 correspond à une période très féconde de l’activité du savant. En 1739, à la suite de publications dans le domaine de l’archéologie, Poleni est nommé à la chaire de philosophie expérimentale qui venait d’être créée à Padoue, et reçu membre associé étranger à l'Académie royale des Sciences. En 1740, il inaugure le Teatro di filosofia sperimentale, premier laboratoire de physique créé dans une université italienne, équipé d’une vaste collection d'instruments scientifiques (certains mis au point par lui-même) réputée dans l’Europe entière. Une partie de ces objets forment aujourd’hui le noyau du musée d'histoire de la physique de Padoue.

Un chef-d’œuvre de l’artiste

L’exécution de ce pastel est brillante, servie par une description virtuose des étoffes et des détails de l’habillement, comme la dentelle de la cravate. En opposant les tonalités dorées des motifs de broderie aux brillances plus froides du violet de la soie, Rosalba obtient un somptueux équilibre de couleurs. Les nuances argentées de la perruque se détachent sur le gris vibrant du fond, grâce à des modulations lumineuses qui mettent en valeur les contours du buste. Le regard profond du savant est franchement dirigé vers le spectateur : ce portrait plein d’autorité est une des belles réussites de l’artiste. Poleni et Rosalba se rencontreront à nouveau quelques années plus tard, dans des circonstances plus sombres. Par le biais de sa sœur Angela qui lui adresse une lettre, la pastelliste consulte en effet Poleni en 1747 alors qu’elle commence à être atteinte d’une cécité qui la contraindra à abandonner ses pastels...

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